Accident chimique de février 2023 dans l’Ohio – Identification des Risques

En février 2023, la fuite de substances chimiques suite à un accident ferroviaire avait fait grand bruit… mais peu en France. Cet article présente les faits et me permet de vous préciser les impacts environnementaux et sanitaires potentiels de cet accident impliquant la fuite et la combustion du chlorure de vinyle dans l’Ohio. Un cas d’école en gestion du risque chimique et de communication au grand public. 

Officials urge evacuation near the Ohio train derailment, fearing an  explosion : NPR

Rappel des faits

le 3 février 2023, un train de marchandises contenant des produits chimiques dangereux déraille dans l’Ohio (USA). Il contient notamment 14 wagons de chlorure de vinyle. Un incendie qui a duré plusieurs jours a eu lieu, et pour empêcher toute explosion, le Conseil national de la sécurité des transports américain (NTSB) a décidé de procéder à la combustion contrôlée de cette substance. Les habitants ont dû être évacués sur un rayon de 1.6km autour de l’accident.

La substance

Le chlorure de vinyle C2H3Cl est un monomère utilisé dans la fabrication du PVC. Dans les conditions de pression et températures normales, le chlorure de vinyle est un gaz incolore avec une légère odeur d’éther si concentré, sinon inodore.

Il est transporté sous pression sous forme liquide. C’est un gaz extrêmement inflammable, qui forme des mélanges explosifs avec l’air. il est stabilisé lors du transport par un inhibiteur pour éviter les risques de polymérisation en cas de contact avec les UV ou la chaleur.

Toxicologie Humaine

C’est un produit cancérigène avéré (CMR1A) en exposition chronique. Je vais évoquer la toxicité des vapeurs qui concernent les personnes exposées autour de l’accident. Les intervenants sont protégées pour les autres risques (contacts cutanés, oculaires). Respirer des vapeurs de chlorure de vinyle peut provoquer, selon la concentration, des effets narcotiques, des vertiges, désorientations somnolence, perte de connaissance. Pour de très fortes concentrations cela peut aller jusqu’à l’arrêt respiratoire.

Cela concerne les personnes se trouvant sur la zone de l’accident. Une exposition chronique elle peut conduire à des cancers. Mais dans le cas de cet accident, l’exposition est surtout celle des produits de combustion du chlorure de vinyle. J’y reviendrai

Ecotoxicologie

Lorsque le chlorure de vinyle liquide entre en contact avec l’eau, une partie s’évapore, une autre est dissoute (1.1g/L, faible proportion à 25°C, peut être plus importante si présence de sels dans l’eau). Le gaz, lui reste en surface de l’eau, sa densité étant plus importante que l’air, les vapeurs forment une nappe en surface de l’eau qui s’évapore assez rapidement.

L’impact sur la biodiversité a surtout été étudiée sur les organismes aquatiques. Côté biodégradation, cela dépend des conditions, il faut notamment la présence d’autres substances pour que la biodégradation soit possible. Elle est donc possible dans des conditions très spécifiques donc on ne peut pas le considérer comme étant biodégradable.

Il est considéré comme faiblement bioaccumulable, non persistent mais de il y a des manques dans les études écotoxicologiques donc difficile de déterminer exactement l’impact de cette substance sur l’environnement.

Produits de combustion

Lorsqu’il est brûlé, il se décompose principalement sous forme de chlorure d’hydrogène HCl, oxydes de carbone et de phosgène. Ces fumées sont très toxiques. Comme expliqué, les symptômes dépendent du degré d’exposition. Mais ça reste un composé dangereux.

D’autres composés comme des dioxines, furanes, des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) se forment et retombent sous forme de fumées, pouvant polluer eaux et sols. C’est le retour d’expérience d’autres accidents de ce type ayant eu lieu dans le passé. Parce que ce n’est pas la première fois que ce genre d’accident arrive. C’est arrivé en 1996 en Allemagne par exemple, avec un retour d’expérience que vous pourrez retrouver sur ce lien.

Les impacts sanitaires et environnementaux sont donc conséquents. La décision prise implique qu’il faudra de nombreuses années pour traiter cette pollution. Dans le cas Allemand, 15 ans après l’accident la pollution est toujours aussi persistante.

Un autre exemple, celui du Brigitta Montanari, montrent que lorsque l’accident arrive en mer, les impacts sont moins importants. Dans ce cas une partie du produit a pu être pompé.

Dans le cas qui nous intéresse, le risque vient à la fois du chlorure de vinyle mais aussi des produits issus de la combustion (fumées et retombées). Les animaux présents à proximités de l’accident sont également impactés. Un suivi des impacts sur plusieurs années sera nécessaire.

J’ai vu des vidéos relayées sur les RS, avec des infos mal explicitées mélangeant la nature des expositions. Bref des interventions qui n’aident pas à la compréhension du sujet. Donc méfiance sur ce que vous pouvez lire notamment si les explications sont courtes et non sourcées.

Je reste tout de même très étonnée du faible relai médiatique de ceta accident… ça ne se passe pas en France mais on parle ici d’un accident chimique important.

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